Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

jeudi 13 mai 2021

MUTATION

     Ne serions-nous pas passés plus simplement à un nouveau cycle, sensible à la double impulsion (ou double entrisme) de l’État et de l’entreprise – ou corrigeons : de l’État-entreprise – une nouvelle variante l’économie de la connaissance ? Un capitalisme culturel qui prendrait appui sur l’idéologie diversitaire, et se réaliserait matériellement à travers l’administration et les bureaucraties de l’équité ? Capitalisme culturel s’entend dans la recaptation des Culture Wars et des thématiques de la gauche identitaire – qui ne contribuerait pas peu à l’instauration ce nouvel état de la production des richesses. D’un côté, la métaphysique des identités se trouve en phase avec l’individualisme néolibéral, elle assure la conversion de cette « gauche » à la logique du marché qu’elle segmente en autant d’identités qu’elle reconnaît. De l’autre, les pressions étatistes pénètrent d’autant plus aisément dans l’espace académique qu’il est acquis de longue date à l’identity politics, il en est le laboratoire d’origine. Posée en termes légaux et bureaucratiques, l’idéologie diversitaire – qu’il convient de distinguer de la diversité elle-même – opère très efficacement à la manière du slogan thatcherien (TINA). Et comment s’y opposer sans être mis en soupçon ? Ce capitalisme culturel est perceptible à la mode DEI/EDI en Amérique du Nord dans les moyennes et grandes entreprises : la race, les races par exemple vont devenir de nouveaux créneaux commerciaux après le sustainable et l’écologisme. Récemment, on faisait état du marché de l’art, des ventes en hausse constante des artistes afro-américains. On a là le complément du capitalisme cognitif. Mais ce ressourcement a un intérêt : on quitte les terres du matérialisme – des processus socio-économiques. En se servant de la culture comme outil de gouvernementalité et fabrique des richesses, on met en oubli de nombreuses autres disparités – des fragilités dont la crise de 2008 avait été pourtant le rappel douloureux…