Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

mardi 17 novembre 2020

BIEN-ÊTRE

     Pour finir, sous l’enseigne « Respectful and Fruitful Debate », les quatre auteures démontent les objections portées à l’encontre du syndicat étudiant et des dénonciations de racisme : primat de la sensibilité, culture du clientélisme, etc. Elles soulignent que si l’histoire a éclaté dans les médias sociaux, les échanges à ce sujet ont été respectueux. Pas un mot sur les pratiques diffamatoires recensées par ailleurs. Surtout elles observent que, quelles que soient les critiques qui entourent cette demande sociale depuis la publication de l’article d’Isabelle Hachey, un élément est indéniable : le fait que de tels propos aient blessé le public étudiant. Sur cette base, et s’efforçant lucidement de séparer « student emotion » et « academic inquiry », les auteures choisissent de privilégier « the well-being of our students over the titillating temptation to utter a word rightly made taboo ». Chacun.e est libre en effet. On s’étonne uniquement que, loin de s’appliquer à lever le tabou, en analysant ses ressorts, les sciences sociologiques et anthropologiques se bornent ici à en constater normativement l’existence. On est encore surpris de voir posé l’usage d’un mot, aussi chargé par l’histoire, comme une simple « tentation » alors qu’il répond dans ce cas aux nécessités d’une démonstration et aux règles de production d’un savoir. Ni plus ni moins. On comprend enfin que, pour les quatre auteures, tandis que les émotions des étudiants et la recherche universitaire demeurent à leurs yeux strictement distinctes, le bien-être devient sinon un objectif du moins l’un des critères de l’activité académique même, entérinant par ce biais la doxa du sensible qu’elles s’efforcent par ailleurs de récuser. Le bien-être consiste-t-il à atténuer, éviter, euphémiser voire taire ? À conforter chacun dans ses croyances et ses certitudes ? Ou au contraire en vue d’une utopie d’émancipation critique à confronter préalablement les individus à la réalité, fût-elle déplaisante et violente ?