Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

samedi 11 août 2018

LE POÈME SOUS LE SAVOIR

À titre empirique, l’auteur décèle par exemple dans l’Esquisse d’une théorie de la pratique (1972) de Pierre Bourdieu « quelque chose d’esthétique » (ibid., p. 84) et lit ses trois études d’ethnologie kabyle « à la manière de poèmes » dont la théorie serait une « sorte de commentaire en prose » (ibid., p. 83). Dès l’instant où il se trouve par analogie (à la manière de) requalifié au moyen de catégories littéraires, le savoir est destiné à un régime d’incertitude. La locution (sorte de) qui sert à déterminer la théorie unit la comparaison à l’approximation comme s’il ne lui était possible d’estimer l’individu – l’acte concret de dire dans lequel s’enracine l’acte abstrait de connaître – qu’à travers l’espèce qui le reclasse faute de pouvoir pleinement le spécifier : l’étude ressemble au poème comme la théorie à son commentaire en prose sans peut-être en relever tout à fait. Michel de Certeau ne distingue pas ici quelque innommable ou quelque ineffable qui se déroberait pour lui faire obstacle au domaine positif de la rationalité. Il pointe très rigoureusement le je ne sais quoi du savoir, le je ne sais quoi qui est l’œuvre du savoir, à la fois son action et son effet.
Sauf si on veut y voir l’éloge convenu (et évacuer aussitôt le problème que cela pose). Ce que je ne crois pas. Justesse du propos.