Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

dimanche 11 avril 2021

COMPLICITÉ, PRÉCARITÉ

    Après les turbulences de Reed College (Oregon) en 2017, le propos de Lucía Martínez Valdivia, Professors Like Me Can’t Stay Silent about this Extremist Moment on Campuses (27.10.2017, The Washington Post) : « No one should have to pass someone else's ideological purity test to be allowed to speak. University life — along with civic life — dies without the free exchange of ideas. / In the face of intimidation, educators must speak up, not shut down. Ours is a position of unique responsibility: We teach people not what to think, but how to think. / Realizing and accepting this has made me — an eminently replaceable, untenured, gay, mixed-race woman with PTSD — realize that no matter the precariousness of my situation, I have a responsibility to model the appreciation of difference and care of thought I try to foster in my students. / If I, like so many colleagues nationwide, am afraid to say what I think, am I not complicit in the problem? » Le premier point : le comment, et non le quoi, « We teach people not what to think, but how to think. » La nécessité en retour de la critique et de la théorie critique contre ce qu’est devenue la Theory et ses usages les plus dogmatiques et les plus politisés. L’autre point : la complicité du silence, la première censure étant celle de la peur, les effets de non-engagement, etc. Cette complicité est une forme d’irresponsabilité collective. Je l’ai constaté à échelle départementale. Une telle attitude conduit également aux pires dérives. On a beaucoup commenté dans les médias les usages de la parole universitaire – l’autorisé, l’interdit, etc., une vraie judiciarisation comme si dans l’espace public elle se limitait à cette unique dimension, en oubliant son pouvoir daction critique, le travail délucidation qui est normalement le sien. Mais on a moins insisté sur les autocensures et les répressions de la parole à l’interne, les mécanismes de domination, de complicité, les collusions, qui favorisent le silence. Le dernier point est éthico-politique : celui que souligne Valdivia en rappelant « the precariousness of my situation » et spécialement ce fait qu’elle est « untenured ». Là où c’est plus fragile. ; là où il y a le moins d’intérêts et le moins de compromis aussi. Dans un autre ordre d’idées, ici au Québec, j’ai trouvé que les interventions les plus percutantes et situées dans les journaux venaient des professeurs de cegeps plutôt que des universités. Éloquent.