Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

mardi 29 décembre 2020

PARRÊSIA ET FRANC PARLER

      Foucault, ma respiration. Michel de Certeau évoquait volontiers son rire. Parmi les conférences données en 1982 à Toronto, sur la notion grecque de parrêsia, que Foucault s’essaie à traduire en anglais par « free speech » puis en français, plus fidèle à ses traits sémantiques d’origine, sous la forme du « franc parler », ceci qui jette une lumière inattendue sur les événements courants : « La parrêsia est la liberté de parler et de dire dans les assemblées politiques tout ce qu’on pense, et tout ce qu’on croit vrai ou utile pour la cité ou juste, sans être victime des retombées de ce qu’on a dit si les gens ne sont pas d’accord avec vous. » (Dire vrai sur soi-même, éd. cit., p. 228). Plus loin, passage que je préfère sinon savoure carrément (une idée on ne peut plus perverse me traverse soudain l’esprit…), que la parrêsia est « la liberté de critiquer le maître quand il dit des stupidités, quand il dit les pires choses » (ibid., p. 230). Quelques paragraphes plus bas, après avoir montré que le concept est inséparable de la cité démocratique, en avoir investigué l’usage dans l’ordre monarchique, Foucault ajoute que le parlement et la liberté de la presse dans les sociétés modernes pourraient être probablement les héritiers de la parrêsia dans le champ politique.