Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

lundi 4 janvier 2021

ACTE DE LANGAGE

     De loin il y avait quelque chose qui depuis le début allait de travers, et occupait un lieu de mon esprit sans que je prenne vraiment la peine de le dénouer. C’est l’interprétation extensive depuis la controverse d’Ottawa sur « nègre » ; pas simplement la non-reconnaissance, pourtant élémentaire au plan méthodologique, entre signe en usage et signe en mention, non-reconnaissance dont les effets sont catastrophiques, on l’a assez répété ; mais la qualification d’un mot chargé par la haine raciale, le colonialisme, l’histoire de l’esclavage, etc. au rang immédiat de « racial slur ». Et dans les circonstances mises précisément en cause au cours de la polémique, cette caractérisation est absolument fausse. Mais voir dans « nègre » une insulte raciale, cela revient à l’interpréter a priori, sans égard pour le paradigme de ses valeurs et contre-valeurs. Dans les termes mêmes de la pragmatique, c’est encore lui donner le statut d’un acte de langage, ce qu’à lui seul le mot comme signe ne saurait être, sinon dans un cadre particulier. Acte de langage, cela suppose surtout que le mot est indexé sur une énonciation – non seulement un contexte social (il y a là un saut souvent commis qui fait l’impasse sur le langage et les langues) mais avant tout un contexte discursif – un locuteur, des interlocuteurs, etc. – bref, l’insulte pour être active doit être adressée. De nouveau, on a pris un emploi pour une essence.