Est-il besoin de préciser que ce racialisme (le terme de whiteness, traduit par blanchité, en est un merveilleux symptôme) est un essentialisme ?
N’est-ce pas injuste de dire que les mouvances ultra-gauche, identitaires et moralistes, sont dépourvues de programme ? Il y a bien une utopie qu’on désigne en rassemblant des traits hétérogènes sous l’expression (que je ne valide pas ; j’y vois plus un non-concept ou un concept par défaut…) de Cancel Culture ? Un travail d’épuration dont les récritures de l’Histoire par censures, dénonciations, diffamations, déboulonnages, etc., sont des variantes. (On m’écoute sceptique, j’ai l’air de prêcher dans le désert, chaque fois que je dis que retirer la statue de James McGill par exemple au vu de son passé esclavagiste est un geste pauvre et inefficace ; qu’une plaque commémorative – un contre-discours – rappelant l’histoire des vaincus, induit une tout autre perception et de l’homme et de l’institution dont il est à la fois fondateur et symbole.)
Nourri à la rhétorique d’extrême-gauche, chez les vieux trotskystes puis les anciens maos, je vois un mode panique de l’argumentation dans la manœuvre qui consiste régulièrement à qualifier vos critiques à droite, cela m’amuse – et il serait difficile d’être plus à gauche que cette ultra-gauche elle-même. Aporie du spectre politique. La stratégie consiste à déclasser et reclasser pour tenter de vous identifier au lieu de se placer en mode dialogique voire dialectique (ne pas trop leur en demander quand même...) On est toujours le conservateur sinon le réactionnaire d’un autre, on est toujours le radical sinon le révolutionnaire d’un autre. Ces stratégies de faibles ont néanmoins leur efficacité, spécialement dans un contexte où dominent sinon le lavage de cerveaux du moins les automatismes de la pensée. Bret Weinstein en dénonçait les ressorts dans son témoignage auprès du Congrès américain en 2017.