Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

dimanche 4 octobre 2020

LES RUINES DE L'ÎLE

     Du moins est-ce ainsi que se pasticheraient les proses de Jacques Réda. D’un esprit cependant peut-être moins vagabond, rêveur ou poétique, celles-ci se visitent aussi à pied ou à vélo. Elles n’incitent guère à l’attitude romantique au nom de quelque ancienneté ou monumentalité par exemple. Au point d’articulation insensible de deux territoires administratifs de l’île – Lasalle et Lachine – auxquels ne restent plus – là – que la vague mythologie de la Nouvelle-France – plus des ladreries que des condos, immondice urbain parmi les immondices, jeté au bas du pont Mercier – égal en dignité aux bouteilles crevées, condoms, cartons trempés, nourriture vomie, résidus rouillés de métaux qui en décorent les tabliers : une corde à linge où s’accroche la pollution ; un patio exigu et son parasol délavé et crasseux qui donne l’illusion enchanteresse de l’été ; des façades éternellement grises pour tout dire, cernées par le bruit inlassable des automobiles qui enjambent le fleuve.