Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

mercredi 3 mai 2023

MONOPOLE

   Quand les universités comme les entreprises ont dû composer avec les attaques de la droite reaganienne qui démantelait et définançait les programmes hérités de l’époque Great Society, contre Title VII (1964) qui exigeait notamment des employeurs qu’ils rendent et tiennent compte de la race de leurs employés, la diversité a constitué un discours euphémique, elle est une manière détournée pour la majorité blanche de parler des autres, et spécifiquement des relations interraciales (cf. Ellen Berrey). Bien qu’elle intègre toujours la catégorie de race, c’est désormais de manière diluée, comme composante parmi d’autres éléments surtout culturels, tels que la langue, la religion, l’appartenance ethnique ou le genre. Ainsi s’explique cependant que la diversité ait pu être utilisée comme stratégie rhétorique et symbolique, susceptible de maintenir le statu quo, et d’aggraver par conséquent les discriminations et les inégalités. À l’inverse, les bases militantes ont évidemment tenté de reprendre à leur compte le mot et de relancer le combat des droits civiques. La sémantique est ici révélatrice de tensions et d’oppositions entre des sujets et des groupes, des valeurs et des intérêts divergents. La diversité a été incontestablement la cible et le lieu de luttes pour le monopole du discours. À la lumière de ces exemples, on peut légitimement se demander si les incertitudes définitionnelles et les réappropriations axiologiques auxquelles donne lieu aujourd’hui la triade « équité », « diversité », « inclusion » ne participe pas d’une logique similaire : une tentative de contrôle, à la faveur de nouvelles sensibilités idéologiques, qui se traduirait, en l’occurrence, par la mainmise du capital et du savoir sur les demandes sociales et culturelles de minorités ou de communautés au nom desquelles ils prétendent parler et faire justice.