Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

mardi 1 juin 2021

CIVILISATIONNISME

    Aussi : il faudra que je dise quelques mots des deux essais de Mathieu Bock-Côté sur le politiquement correct et le racialisme de ce qu’il appelle « l’inquisition woke ». On n’est plus dans le savant mais la politologie à gros écho médiatique. La pensée people, ce qui n’empêche pas de justes observations. Mais cela a un intérêt, et il me semble une erreur (et même contre-productif), sinon une vaste hypocrisie, de diaboliser l’auteur comme s’y essaie l’extrême-gauche qui, au demeurant, parle la même langue que lui – celle de l’identité et de l’identitaire. Le paradigme politique du moment. Car c’est très exactement le contre-argumentaire civilisationniste à l’opposé des thèses décolonialistes. Et puis une cohérence surprenante, qui me plonge dans une durable perplexité : pas simplement le jeu réciproque de courtisanerie avec le public français, et la vision fascinée et fantasmée que Bock-Côté a de l’hexagone, en plus de son désir d’un Québec qui n’existe pas. Mais sur le versant droite conservatrice, absolument assumé, qu’il distingue de lui-même de la droite libérale (centriste-moderniste) et de la droite populiste, la chaîne Zemmour-Murray-Finkielkraut-Gauchet et l’étiquette Néo-réactionnaires du début des années 2000 (Daniel Lindenberg), que, très sarcastiquement, il impute aux paranoïas de la gauche. Mais c’est bien de cette descendance qu’il se réclame, et dans le mécanisme polaire avec le wokisme – qui déplie à échelle québécoise sur un mode résolument soft des tensions par ailleurs perceptibles en terre états-unienne depuis 2010, l’impression de nouer ou raccorder soudain des fils jusque-là emmêlés depuis non moins de 20 ans – l’image en tous cas d’une trame cohérente (peut-être trompeusement cohérente) – d’un scénario possible du problème.