Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

samedi 8 janvier 2022

COMMENT METTRE LE GRAND "AUTRE" À LA MODE

      Le dernier cri à l’université d’Ottawa (source signalée par Joseph Facal en date du 08.01.2022) : une annonce de poste sur les questions autochtones contemporaines (souveraineté alimentaire, anthropologie de l’environnement, résistance et/ou résurgence autochtones, études bispirituelles et queer, critiques décoloniales et anticoloniales, etc.) de l’Institut d’études féministes et de genre et de l’École d’études sociologiques et anthropologiques. On y lit bien sûr que « la préférence sera accordée aux personnes autochtones qui ont des liens vérifiables avec leur communauté autochtone. » Et à ce sujet, il est précisé : « L’Université d’Ottawa prendra des mesures pour confirmer “l’identité autochtone” des candidats et candidates dans le cadre du processus de recrutement et de sélection. Pour confirmer “l’identité autochtone” des candidats retenus dans le cadre du processus de recrutement et de sélection, nous allons suivre les procédures suggérées par l’Institut de recherche et d’études autochtones. » Là où il est question de critère ethno-racial. Quant aux qualifications : « Un doctorat en anthropologie, études autochtones, études féministes et de genre, ou dans un domaine connexe. Les candidat.es exceptionnel.le.s qui n’ont pas de doctorat seront pris en considération s’ils ou elles détiennent des savoirs autochtones reconnus, ont des liens avec des communautés autochtones, utilisent des méthodes de recherche et d'enseignement autochtones ou ont des travaux universitaires remarquables reconnus par d'autres chercheur.e.s autochtones. » (Je souligne) On se demande bien ce que sont les méthodes de recherche et d’enseignement autochtones, en quoi ils seraient spécifiques, ce qui fait aussitôt l’impasse sur les critères épistémologiques de reconnaissance de ces méthodes, sur l’histoire des disciplines, etc. Une nouvelle variante de romantisme par esthétisation de l’autre. Une autre forme de méconnaissance de l’autre par essentialisation. Non seulement on hypothèque les exigences de recherche et d’enseignement à la base de la sanction institutionnelle qui commande la logique de recrutement (la dérogation au diplôme normalement attendu, et il est pour le moins paradoxal dattendre une expertise en méthode et recherche en faisant l’économie du diplôme qui est centré sur cette question même...), mais vis-à-vis des populations autochtones elles-mêmes cette démarche dissimule mal une forme détournée et inavouée de paternalisme (et partant : d’un colonialisme qui ne dit pas son nom). Dans tous les cas, c’est pleinement cohérent avec la conception des « savoirs » comme expression des « identités ».