Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

mercredi 12 janvier 2022

DIVERSITÉ

   Il n’est probablement pas de terme plus galvaudé, et sémantiquement démonétisé, que « diversité » par les temps qui courent. Il apparaît comme une catégorie vicaire – un tenant-lieu d’un concept absent. Ce qui, à rebours, en fait un lieu commun, un mot à la mode. La diversité opère d’abord comme idéologème privilégié au sein de la rhétorique managériale : relais après les politiques d’affirmative action et d’égalité à l’emploi, elle constitue dans le milieu entrepreneurial un outil de gestion des inégalités socio-écononiques (voir W. Michaels) et une représentation du social. Comme marqueur dans le champ savant, et spécialement en sciences sociales, elle n’est pas moins un élément « poreux, malléable et indéterminé » qui, pour cette raison, perd, d’après Jean-Philippe Warren, « une grande part de son pouvoir explicatif » (« L’usage du concept de diversité en histoire québécoise », Bulletin d’histoire politique, n°27-3, Montréal, VLB, 2019, p. 190.). Et de quoi parle-t-on ? Diversité géographique ? économique ? sociale ? religieuse ? ethnique ? culturelle ? raciale ? Etc. De même qu’il y a lieu de préciser ses rapports aux « disparités », il convient de clarifier techniquement ce qui la distingue de notions telles que la « pluralité » ou le « multiple ». Autre élément : l’observation de Lévi-Strauss, qu’il y a dans l’humanité plus de cultures que de races (« Race et histoire »), et en conséquence, ce n’est pas la même chose que de penser l’anthropologique sous l’angle des races et dans l’optique des cultures. Et finalement, au point de vue qui m’importe le plus : peut-on poser la diversité, la penser, sans la condition empirique des langues ? Le pluriel des idiomes – qui fonde l’historicité de l’humain.