Hier dans L’Est Républicain : « Comment
Metz a inspiré Paul Verlaine » (10.08.17), à la rubrique « Histoire
de l’été ». Car du point de vue journalistique, il se passe peu de chose
entre juin et août, les événements se raréfient. L’écho du monde vient mourir
sur les plages, au terme des grandes migrations rituelles des nationaux et citadins.
La politique, l’économie, l’écologie, le social laissant désormais plus de
place, le mieux pour nourrir les loisirs de la lecture est encore d’imprimer le
patrimoine et la culture. Certes, je n’ai jamais beaucoup goûté la presse
régionale, et il est des quotidiens plus désespérément rachitiques que
celui-ci : La Voix du Nord par exemple, qui me laisse un souvenir comme…
monumental, et autres feuilles de chou de même acabit. Mais l’article signé Philippe
Marque divertit aussi bien par les lieux communs qu’il recueille, Metz
inspiratrice du génie poétique, que par le silence entourant la genèse
muséographique de la maison Verlaine. Illustrant le premier cas, l’auteur
gratifie de la sorte son public oisif de la chauvine « Ode à Metz »,
insérée en 1896 dans le volume posthume Invectives, y voyant un « discours engagé »,
celui de la Revanche, dans sa forme « symbolique et allégorique ». L'apothéose est encore la mise en scène photographique de Bérangère Thomas. À l’origine
de la maison natale, et de sa reconstitution (objets d’époque, fac-similés,
dessins, affiches, etc.), – opération en soi louable – la présidente de l’Association
des Amis de Verlaine explique : « C’est à Metz que s’est formée sa
sensibilité poétique », l’auteur de l’article ajoutant : « Pourtant,
Verlaine n’aura vécu que 34 mois, en deux temps, à Metz »… Au mythe
succède l’habituel cliché : « Bérangère Thomas y voit les prémices de
son art impressionniste ». C’est que la présidente, autrement directrice
éditoriale du très léger « magazine » L’Actualité Verlaine, est désormais la « dépositaire
de [l]a mémoire » de Verlaine. Fidèle à la veine régionaliste, l’article
se conclut de nouveau sur l’annexion allemande de la Lorraine, et l’esprit d’engagement et
de revanche de Verlaine, sans voir ce que ces deux expressions peuvent avoir de
potentiellement oxymoriques : le poète bonne conscience de son temps,
immergé dans le discours social des années 1870-1914. Dans ce cadre
idéologique, il est pour le moins surprenant que l’auteur de l’article ne
mentionne pas les autres activités publiques de Bérangère Thomas, son rôle d’élue
municipale à compter d'avril 2014 à la ville de Metz sous la bannière du Front National*. Après Jacques Robichez et Yves-Alain Favre, deux éditeurs certes d’un
autre rang, il semble que le poète catholique, nationaliste et réactionnaire de
Sagesse continue d'avoir néanmoins, par résurgences, fondé sur de nombreux
malentendus et des lectures partielles sinon orientées de l’œuvre, ce bien
curieux héritage…
* http://metz.fr/pages/conseil_municipal/membres_conseil_municipal.php