Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

vendredi 11 août 2017

PATRIMOINE ET HÉRITAGE

Hier dans L’Est Républicain : « Comment Metz a inspiré Paul Verlaine » (10.08.17), à la rubrique « Histoire de l’été ». Car du point de vue journalistique, il se passe peu de chose entre juin et août, les événements se raréfient. L’écho du monde vient mourir sur les plages, au terme des grandes migrations rituelles des nationaux et citadins. La politique, l’économie, l’écologie, le social laissant désormais plus de place, le mieux pour nourrir les loisirs de la lecture est encore d’imprimer le patrimoine et la culture. Certes, je n’ai jamais beaucoup goûté la presse régionale, et il est des quotidiens plus désespérément rachitiques que celui-ci : La Voix du Nord par exemple, qui me laisse un souvenir comme… monumental, et autres feuilles de chou de même acabit. Mais l’article signé Philippe Marque divertit aussi bien par les lieux communs qu’il recueille, Metz inspiratrice du génie poétique, que par le silence entourant la genèse muséographique de la maison Verlaine. Illustrant le premier cas, l’auteur gratifie de la sorte son public oisif de la chauvine « Ode à Metz », insérée en 1896 dans le volume posthume Invectives, y voyant un « discours engagé », celui de la Revanche, dans sa forme « symbolique et allégorique ». L'apothéose est encore la mise en scène photographique de Bérangère Thomas. À l’origine de la maison natale, et de sa reconstitution (objets d’époque, fac-similés, dessins, affiches, etc.), – opération en soi louable – la présidente de l’Association des Amis de Verlaine explique : « C’est à Metz que s’est formée sa sensibilité poétique », l’auteur de l’article ajoutant : « Pourtant, Verlaine n’aura vécu que 34 mois, en deux temps, à Metz »… Au mythe succède l’habituel cliché : « Bérangère Thomas y voit les prémices de son art impressionniste ». C’est que la présidente, autrement directrice éditoriale du très léger « magazine » L’Actualité Verlaine, est désormais la « dépositaire de [l]a mémoire » de Verlaine. Fidèle à la veine régionaliste, l’article se conclut de nouveau sur l’annexion allemande de la Lorraine, et l’esprit d’engagement et de revanche de Verlaine, sans voir ce que ces deux expressions peuvent avoir de potentiellement oxymoriques : le poète bonne conscience de son temps, immergé dans le discours social des années 1870-1914. Dans ce cadre idéologique, il est pour le moins surprenant que l’auteur de l’article ne mentionne pas les autres activités publiques de Bérangère Thomas, son rôle d’élue municipale à compter d'avril 2014 à la ville de Metz sous la bannière du Front National*. Après Jacques Robichez et Yves-Alain Favre, deux éditeurs certes d’un autre rang, il semble que le poète catholique, nationaliste et réactionnaire de Sagesse continue d'avoir néanmoins, par résurgences, fondé sur de nombreux malentendus et des lectures partielles sinon orientées de l’œuvre, ce bien curieux héritage…


* http://metz.fr/pages/conseil_municipal/membres_conseil_municipal.php