Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

samedi 24 juin 2017

MALENTENDU


Sur le malentendu théorique, il y aurait à disserter longuement. Les exemples sont multiples et variables selon les disciplines. Ils donnent lieu quelquefois à des querelles vives. C’est le sentiment que j’éprouve en parcourant de nouveau le beau livre de Lucie Bourassa, L’Entrelacs des temporalités. Du temps rythmique au temps narratif (Montréal, Nota Bene, 2009). Alors qu’il procède à des relectures de saint Augustin, Benveniste, Meschonnic, envisageant une question capitale, le passage des petites unités discursives aux grandes unités du récit, l’essai porte bien davantage sur le temps que sur le rythme, ou le rythme comme temps. L’ouverture par Lessing, le préambule général surtout posent le temps à la manière kantienne, comme une catégorie a priori de l’expérience humaine : « Le temps, qui pour l’homme est un problème existentiel et spéculatif, constitue un enjeu majeur de la littérature : l’une des fonctions de celle-ci est en effet de permettre au sujet, qu’il soit écrivain ou lecteur, de se représenter, de structurer les multiples facettes de la temporalité et d’en faire l’expérience. » (p. 9). D’où le recours par la suite, bien plus prépondérant, aux philosophies de Ricoeur et de Heidegger. Alors que l’intérêt du rythme conçu dans la perspective d’une poétique est qu’il excède l’antinomie des catégories espace-temps, et tend précisément à les neutraliser.