Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

jeudi 7 octobre 2021

PAROLE DE COLÈRE

       Ce matin, dans La Presse, caricature délicieuse de Serge Chapleau, représentant le premier ministre du Québec, un dictionnaire des synonymes sous le bras, et répliquant, mi-pincé mi-goguenard : « Vous n’aimez pas ma définition ? Je peux vous en trouver d’autres ! » Il faut dire que le débat public fait rage autour de cette expression de « racisme systémique » dont les emplois répétés ne tendent qu’à fabriquer une évidence ou à imposer un dogme. Le retour à certains sources s’imposent, mêlé de prudence et de méthode minimales, à commencer par la parole des militants. Black Power. The Politics of Liberation, souvent cité et présenté comme point d’origine. L’éditeur (Vintage Books, NY, 1992) inscrit sur sa 4e de couverture que « Stokely Carmichael and Charles V. Hamilton exposed the depths of systemic racism in this country »… À en croire l’index d’abord, le terme n’est pas répertorié alors que « racism » y représente une entrée avec une série de sous-items. En vérité, c’est sur un mode dualiste (overt/covert racism) que s’articule ensuite l’opposition (au demeurant peut-être plus claire et efficace) entre « institutional racism » et « individual racism » dans le but d’en penser la dimension collective. Seuil de complexité supplémentaire : colonialism est posé dans le texte comme équivalent de institutional racism. Point de traces de systemic racism en l’état actuel de ma lecture. Par contre, des occurrences répétées de « racist system », ce qui est sensiblement différent. Mais on voit comment on est passé de l’un à l’autre : inversion et extension à peu près complètes d’une catégorie dont l’historicité n’est pas comparable évidemment. En 1967, c’est une parole de colère, inséparable des Civil Rights, et des obstacles et inégalités continus en dépit des mesures votées. Dans tous les cas, ces termes se rapportent à une rhétorique de combat, pas à un champ ou à un exercice de conceptualisation.