Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

vendredi 8 janvier 2021

DU DÉSIGNATEUR AU PERFORMATIF

Un point simple à clarifier tourne autour de l’assimilation de « nègre » à une « insulte ». Pourquoi depuis le début cela fait difficulté à mes yeux.  Il y a la dimension pragmatique bien sûr que j’évoquais plus tôt. Mais il y a surtout une impropriété lexicale (ou métalexicale) plus élémentaire encore derrière cette qualification inexacte au plan linguistique. Là encore, la zone de confusion se situe entre une dénomination ou plus rigoureusement une désignation injurieuse, dégradante, humiliante (incontestablement) – celle qui fait de « nègre » un sujet parlé – l’altérité muette dont j’ai déjà parlé – le délocuté des cultures blanches dominantes – et qui rend de fait justice à l’argument d’Achille Mbembe autour de ce qu’il appelle un « sujet de race » dans sa Critique de la raison nègre (ou au premier mouvement d’individuation historique fondée sur l’oppression et la déprédation, etc.) ;  donc, amalgame entre cette désignation et un acte du langage (ce qu’est véritablement une insulte au même titre qu’un ordre, une promesse, etc.), lequel suppose une énonciation, des sujets qui la produisent et la reçoivent, un contexte discursif, etc. – le signe s’ouvrant au régime des emplois et des valeurs (ce qui par ailleurs ouvre la possibilité du deuxième volet, l’individuation repérée par Mbembe, individuation critique et même polémique et subversive – la revendication du désignateur en contre-insulte par les communautés, les activistes, etc., c’est-à-dire le performatif éthico-politique au fond).