Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

jeudi 6 décembre 2018

SANS NOM

Difficile de ne pas sangloter, en lecteur client du pathétique et du pathos, à la mort de Jean Valjean, qui clôt le roman ; plaisir de l’émotion gâté ou daté néanmoins par la scène familiale – très bourgeoise ou très XVIIIsiècle encore – Cosette et Marius « à genoux, éperdus, étouffés de larmes » (p. 1254) – l’art d’être grand-père et ses enfants d’adoption, en contemplant la lumière dans les ténèbres de la mort, les chandeliers volés à lévêque de Digne, et le crucifix, puis retour évocatoire aux « jeux » et aux « bons rires de l’enfance » qui deviennent de « l’ombre » (p. 1253) ; mais la réclamation testamentaire expirée : « […] vous n’oublierez pas que je suis un pauvre, vous me ferez enterrer dans le premier coin de terre venu sous une pierre pour marquer l’endroit. C’est là ma volonté. Pas de nom sur la pierre » (id.) – puis la « pierre toute nue » dans un coin invisible et peu fréquentée du Père-Lachaise près de « la fosse commune » : « aucun nom » (p. 1254) en paradigme de tous les sans-noms de l’histoire, celles et ceux qui la font vraiment  invisibles. La pierre sur laquelle, devenus illisibles, sont inscrits les vers de lauteur qui se présente simplement et uniquement comme « une main » (id.) sur le livre-monument au terme de plus de vingt ans décriture...