Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

mardi 18 décembre 2018

LABORATOIRE

Au principe de cette rengaine il est certains motifs, quelques-uns plus saillants que d’autres, à commencer par ce que je n’avais pas d’abord considéré, l’idée cependant aussi simplement énoncée qu’efficace de « laboratoire lagarcien ». L’expression donne droit certes à la dimension expérimentale – de l’expérimentation visuelle sur la base des techniques cinégraphiques à la mise à l’épreuve des relations et passions humaines qui caractérise déjà en propre la scène classique – le laboratoire comme révélateur du drame familial noué à l’imminence de la mort. Mais ce laboratoire par l’entremise du théâtre, et probablement à la condition de la littérature, libère l’image d’elle-même : elle soustrait l’auteur à la manière qui était jusque-là la sienne pour frayer en la continuant des zones méconnues ou inconnues, ignorées ou devinées, amorcées sans être explorées, etc. De ce point de vue, le laboratoire est bien un essai au sens littéral du terme, essai des personnages, des comédiens et du réalisateur sur eux-mêmes. En conséquence, le laboratoire met à nu une éthique, sans laquelle se ne comprend pas cette déclaration, apparemment présomptueuse ou imprudente, selon laquelle Juste la fin du monde serait (de son aveu même) le meilleur film que l’auteur reconnaît avoir réalisé – dans l’historicité de son présent – de ce faire au moment où Dolan se situe et l’énonce précisément. Ouvert, mobile nécessairement : en devenir de lui-même.