Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

vendredi 1 février 2019

PROSODIE GÉNÉRALISÉE

Dans le vis-à-vis poésie / roman, qui reprend le débat dans l’état où l’avait laissé Breton, et tend du même geste à se réapproprier la catégorie du quotidien (avec des omissions remarquables : Aragon par exemple), l’idée de « prosodie généralisée » (Répertoire, II, p. 23) à revers de la lecture anthologique qui perçoit des temps ou des passages poétiques dans le roman. Contre cette logique locale Butor pose que « le roman peut et doit être poétique […] dans sa totalité » par concaténation des phrases, paragraphes, épisodes, et dans la suite de Mallarmé déclarant que la forme vers est simplement la littérature : « style », « forme » puis « réflexion sur la forme » et « par conséquent prosodie » (p. 22). L’extension comme la conclusion ne cessent pas d’être troublantes mais s’appuient sur « la voix de la rue » puisqu’il s’agit désormais de « donner un sens nouveau », contextes et énonciations à l’appui, non seulement aux mots mais aux « phrases de tous les jours » (p. 23), en détournant elle-même la logique surréaliste de la « rencontre » (p. 24). Comme entrée dans ce « processus d’intériorisation de la prosodie », capable d’investir la « banalité » ou « réalité quotidienne », d’expliciter « sa situation » (p. 25) comme poésie et de laisser émerger une réflexivité critique (« La poésie romanesque est donc ce par l’intermédiaire de quoi la réalité dans son ensemble peut prendre conscience d’elle-même pour se critiquer et se transformer », p. 26), l’exemple dérobé et opposé à Breton, celui des poèmes conversations d’Apollinaire. Ce qui « joue sur les rencontres de phrases » (p. 24) – principe à interroger lui-même pour la poésie longue des « études » américaines.