Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

vendredi 8 février 2019

ACTUALITÉ

En considérant la notion ambiguë de l’actualité, entre autres pour se dessaisir de la version journalistique de la parole critique, l’auteur la soustrait à la logique de l’immédiat, il donne à repenser sur le long cours la catégorie du présent, plus largement l’idée même d’événement tel que, simultanément, il produit l’œuvre, se trouve produit par l’œuvre : « Lorsqu’on parle d’actualité, il me semble qu’on oublie une dimension très importante de cette actualité : l’échelle temporelle. Il y a plusieurs actualités superposées : l’actualité au jour le jour, l’actualité à la semaine, qui est l’actualité de l’hebdomadaire, et on sait bien que les hebdomadaires ne parlent pas tout à fait des mêmes événements que les journaux. De même il y a une actualité qu’on peut mesurer au mois et une autre qu’on peut mesurer à l’année. Et de même les travaux que je fais ont une échelle d’actualité assez variée, une échelle, je l’espère, de dizaine d’années. C’est donc dans dix ou dans vingt ans ou même plus tard que l’on verra l’actualité véritable de mes travaux. » (Entretiens, t. II, p. 43). Et il est remarquable que Butor désigne l’acte de création par ses travaux – en chantier, dans linachevé et louvert.