Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

jeudi 5 janvier 2023

CINÉ POISSEUX

   Chien blanc, adaptation au cinéma par Anaïs Barbeau-Lavalette du roman du même titre de Romain Gary. On ne saurait mieux débaucher le talent artistique et liquider ses moyens dans le sirop moralisateur de l’époque. On ne saurait donner vision plus caricaturale de ce que sont un écrivain et une œuvre de littérature – de ce qu’elle fait. Images poisseuses. Si vous n’aviez pas compris, par un sens aigu et rigoureux de l’histoire, que la marche des Civil Rights et George Floyd, au fond c’est la même chose, on vous assène en conclusion de la poésie rythmée sur la bêtise humaine et l’espoir, des séquences de brutalités policières agrémentées de militantisme BLM. Car on vous fait pendant presque deux heures la leçon sur la culpabilité des intellectuels blancs et comment se battre pour la juste cause des communautés noires opprimées. On vous éveille. Malgré quelques trouvailles, des plans séquences en extérieur, et certains coups de griffe appréciables autour du personnage de Jean Seberg, gages d’une soudaine et rare complexité dans cette « œuvre », quel ennui ! Aucune distance. La lecture la plus dérisoirement présentiste qui soit. Et l’utopie sinon le fantasme de la rééducation du chien demeurent finalement sous-exploités. Ce film n’est pas une œuvre d’art, c’est un discours – le discours social de notre temps, ça pontifie, ça prêche, ça dégouline. Le discours que tiennent les apôtres de la sensibilité et autres curés du XXIe siècle – avec quelle suffisance. Celui qui me rend décidément étranger à mes contemporains. La bêtise est-elle là où l’on croit la dénoncer ?