Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

vendredi 6 août 2021

TRANSFERTS

   Sur ce point précis, ce qui s’impose à l’observation c’est de voir côté européen et spécialement français combien une génération de chercheurs et de penseurs a été gagnée au cours des deux dernières décennies aux théories CRT et postcoloniales comme il en va pour ce qui regarde les études de genre. Je ne parle pas des mouvances politiques indigénistes et autres. Mais des modélisations en cours en sciences sociales comme en philosophie, spécialement la philosophie politique, en littérature aussi (cela commence à poindre). Des discours qui de près de loin sont parlés par les idéologies diversitaires et l’antiracisme contemporains et dont il y aurait lieu de mesurer rigoureusement l’inventivité disciplinaire. Sans parler des questions de transferts épistémologiques, particulièrement sensibles en ce que les modèles nord-américains y servent régulièrement la critique de la société républicaine française. À titre de jalons : Elsa Dorlin, La matrice de la race. Généalogie sexuelle et coloniale de la nation françaiseParis, Éditions La Découverte / Genre & sexualité, 2006 ; Magali Bessone, Sans distinction de race ? Une analyse critique du concept de race et de ses effets pratiques, Paris, Vrin, 2013 ; Faire justice de l’irréparable. Esclavage colonial et responsabilités contemporaines, Paris, Vrin, 2019. Etc. Ce paradigme « culturaliste » (l’identitaire, le divers, le global, etc.), il semble nécessaire de le soumettre à l’examen critique. Le travailler par la poétique, pour le discours qu’il fait, le discours de l’épistémè racialiste. Le situer aussi : je persiste à dire que dans ce discours se dit une hégémonie culturelle – nord-américaine, qu’il est particulièrement piquant de relever chez des adeptes du divers et du multipolaire  tellement les instruments en usage pour décoloniser la pensée se révèlent sans trop le dire hautement colonisées elles-mêmes...