Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

mercredi 19 août 2020

DU HAUT DE LA MONTAGNE

 

En l’état, j’éprouve les dernières lumières d’août, au moment où les chaleurs vacillent voire s’abattent, laissant déjà flotter dans l’air un avant-goût d’automne. Ces rares journées, aux couleurs précaires, se signalent parmi les plus douces, les plus jouissives. En attendant, j’ai quitté en esprit la plaine et gravi La Montagne magique. Cette microsociété de tuberculeux, à la fois pathétique et dérisoire, isolée dans les hauteurs d’un sanatorium suisse, vient comme à propos, avec toute la charge ironique de Thomas Mann : « C’est vrai que c’est une surprise pour moi d’apprendre que je suis un peu malade, il faut que je m’habitue d’abord à me sentir ici comme un pensionnaire en traitement, et vraiment comme l’un des vôtres, au lieu de n’être, comme j’en avais l’impression jusqu’à présent, qu’un invité. […] Quoi qu’il en soit, me voilà depuis hier à me demander dans quelles dispositions profondes j’étais à l’égard de tout, de la vie, tu comprends, et de ses exigences. » (Romans et nouvelles, t. II, La Pochothèque, 1995, p. 802). L’événement de se reconnaître malade, qu’est-ce que cela veut dire ? qu’est-ce que cela fait ?