Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

vendredi 29 mars 2019

MATIÈRE-SUJET

Dans le continuum peinture et littérature, et les collaborations sont nombreuses et de longue durée chez Butor, au point qu’elles suscitent une renaissance de sa création poétique qu’avait suspendue, déplacée ou négociée autrement l’expérience romanesque, le discours de la matière qui gouverne par ailleurs les ressources de l’objet-livre et les puissances optiques de la page : « Cette évidence de la matière est quelque chose de très particulier à la peinture. Il y a des peintres à matière très visible. Ça se traduit en général dans la peinture à épaisseur comme Rembrandt et dans la peinture lisse dans laquelle le peintre s’efforce de masquer sa propre main comme Van Eyck, Ingres, Mondrian… […] Lorsque le peintre veut se cacher c’est aussi une façon de se montrer. Voir comment Mondrian s’efforce de se cacher et voir justement comment il se montre admirablement dans cette pudeur et cette modestie, c’est merveilleux !... » (Entretiens, t. II, p. 84). Matière-signature ou matière-sujet : la matière qui se retire dans sa visibilité même.