Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

lundi 11 mars 2019

LE NÉANT DE LA BEAUTÉ

Vu hier sur petit écran Le règne de la beauté (2014 – Les Films Séville) de Denys Arcand. Sidéré en dépit de la qualité photographique réelle de certains plans (les hauts de Charlevoix, le traversier Québec-Lévis, Toronto), motivés notamment par le double jeu entre architectures et fenêtres, de la nullité scénaristique, l’incapacité à revoir la stéréotypie même du schéma adultère, passé aux filtres d’innombrables intrigues (romanesques, pour commencer), à se ressaisir du banal au lieu de le répéter. À commencer par les silences de dialogues pauvrement exploités. Au fil des saisons, on reste froid et impassible face à cette vie tranquillement (et caricaturalement) néo-bourgeoise dont les seuls soucis sont la tromperie et la folie, un univers sans enjeux ni conflictualité sociale – ou guère. Et ces deux sommets : la partie de golf et ses ralentis qui occupent l’ennui du spectateur ; les scènes érotiques – particulièrement la première nuit avec son demi-obscur conventionnel, l’insert carte postale Toronto by night (vue sur le Lac et CN Tower), mêlé au toucher mélodique d’un piano déjà-entendu. La nudité des corps, le désir et la jouissance sur la ligne extrême de la platitude : lamour soft ou hygiénique, la tentation proprette, épurée, récurée, à l’image de la douche que prennent, un peu embarrassés, les deux amants avant de consommer  – ou mieux encore : cette brosse à dents que ne manque pas d’acheter Lindsay-aux-yeux-bleus à Luc-aux-yeux-noirs... Jai craint un instant quelle ne lui proposât un rince-bouche en vente dans tous les drugstores de la ville.