Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

mardi 21 novembre 2023

VUE D'ICI

    La question a déjà été posée et elle constitue en soi un débat vu d’ici. Arrêt sur le courant conservateur québécois, spécialement Étienne-Alexandre Beauregard : Le schisme identitaire (Boréal, 2022), tout droit sorti du cabinet Legault. D’abord, la vitalité de l’école Beauchemin, le militantisme de droite. Un geste – militer pour conserver – qui est résolument étranger à ma culture et à mon histoire – à comprendre donc. Ensuite, la guerre culturelle vue d’ici – un lieu commun de la controverse politique (est-ce qu’il y a une guerre culturelle au Québec ?, etc.). Usages de Gramsci – relecture des Cahiers de prison in extenso. L’auteur suit la même stratégie que la droite française, le tandem Buisson-Sarkozy. Ce qui confirme la triangulaire des néo-cons dont Bock-Côté est une cheville ouvrière entre USA, France et Québec. De ce point de vue, bien d’accord avec Dupuis-Déri sur le marché international des idées conservatrices, point fort de Panique, le reste relevant de la somme nulle, comme je ne me suis pas privé de le lui dire. Beauregard : nationalisme ethnique assumé, balayage sous le tapis de la question autochtone, généalogie intéressante en revanche de la tradition conservatrice made in QC et du torysme canadien. À côté des simplifications qui entourent Gramsci, toujours lu de seconde main : ce qu’il retire également de J.D. Hunter. Pour ce dernier, la guerre culturelle engage une définition de l’Amérique en mettant en jeu des conflits de normes et de valeurs, divergences morales qui traversent la famille, les médias, l’éducation, la culture, la politique, tracent des lignes de failles à l’intérieur des confessions religieuses comme des sensibilités idéologiques (démocrates – républicains) ; chez Beauregard il s’agit plutôt d’une analyse historique de la recomposition du champ politique dans le Québec postréférendaire. L’idée de « guerre culturelle » ressortit là encore à un abus conceptuel.