Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

mardi 21 novembre 2023

HANTISE

    C’est en tous cas dans cette perspective que prend sens dans le film le monologue de l’archiviste baigné d’une lumière automnale et mélancolique. Sa voix crépusculaire, manifestant l’impatience de quitter ce monde, traduit la même hantise que celle de l’artiste : mesurée ici à l’aune de la culture de l’effacement, la crainte de disparaître sans laisser de trace. De manière implicite s’y mêle la question du déclassement possible de l’auteur, son vieillissement social dans le milieu du cinéma. En contrepoint, le film tire un bénéfice tout théâtral de l’unité de lieu : centrée dans la plupart des séquences sur cette résidence pour aînés, il multiplie les saynètes, les gags et les traits d’esprits en ciblant jusqu’à la caricature la jeunesse woke comme l’arrière-garde indépendantiste, la société du spectacle ou la duplicité des dirigeants politiques.