Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

samedi 4 juin 2022

POPULISME DE GAUCHE

   Le court essai d’Assouly sur la cancel culture. Prise juste sur les fractures de la société états-unienne, spécialement la question raciale, le lien à « la colère des groupes minoritaires en mal de justice et de reconnaissance » (p. 21) comme la demande de révision historique – donner voix aux exclus et aux vaincus de l'histoire. En marge : quelques contournements rhétoriques que l’on trouve également chez Laure Murat devant la violence abréactive et punitive – cette complaisance audible chez certains collègues, prêts à relativiser et à banaliser, l’attitude symptomatique d’une gauche incapable d’assumer ce fait qu’elle censure aujourd’hui au même titre que la droite, incapable par conséquent de pratiquer son autocritique. L’argumentation convainc peu lorsque l’auteure tend à qualifier la « censure populaire » sous l’angle de « dérives », « excès » ou « débordements ». La corrélation avec le courant woke est mieux saisie ; mais elle l’est plus au plan idéologique qu’au plan sociologique ; par contre, le phénomène est dûment caractérisé comme « populisme de gauche » (p. 36). Un élément capital est le tableau comparatif : la méprise qui entoure la réception de la cancel culture et du courant woke en France, « des concepts souvent inadaptés à nos problématiques » (p. 39). Voir la mésaventure personnelle à Mediapart à l’automne dernier (ou comment parler sur la base d’un malentendu). Il manque en contrepoint à cette analyse d’autres pays de référence : Royaume-Uni, Canada et Australie par exemple. Car c’est un enjeu particulier aux sociétés anglophones, il me semble. À rebours, la stratégie du pouvoir macroniste, de la controverse délirante sur l’islamo-gauchisme au colloque de la Sorbonne en janvier 2022 sur la déconstruction, sans parler d’autres épouvantails ridicules comme la French Theory, est bien pointée.