Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

dimanche 28 février 2021

PORTRAIT DU CONFORMISTE HEUREUX

    Dans cet ordre d’idées, je savoure le portrait satirique qu’en fait Pierre-André Taguieff, et je reviendrai plus tard sur ma lecture en cours de L’Imposture décoloniale (à travers mes zones de résistance : les séquences polémiques avec la rhétorique des mots composés – le système des étiquettes et des préfixes, le fait que l’auteur discute assez peu des auteurs fondateurs, Saïd, Bhabha, etc., – sa tête de Turc côté anglo est Spivak – et plus de l’institutionnalisation du postcolonial en dogmatique universitaire, le continuum pas net entre la catégorie « postcolonial » et « décolonial » qui, si j’ai bien compris, en serait la manifestation/traduction politique-politisée) – malgré cela (pardonnez mes détours, bien fictif lecteur), je savoure donc cette charge contre le mimétisme idéologique de suiveurs sur leur retour d’âge, qui voulant prendre le sens de l’histoire n’ont pas compris qu’ils se déclassaient intellectuellement par ce geste même : « Une mode intellectuelle et langagière ne touche pas l’ensemble des représentants d’une génération. Mais elle “donne le ton”, confère à ceux qui la suivent une distinction culturelle et la satisfaction de sembler “être de son temps”. Chez beaucoup, la hantise d’être “dépassé” ou “ringard” est une motivation suffisamment forte pour leur faire prendre le train en marche, en s’asseyant dans le bon sens. C’est la manière la plus accessible d’imaginer faire partie d’une élite. Rien de plus banal qu’un conformiste heureux. » (Éditions de L’Observatoire, 2020, p. 220-221).