Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

mercredi 15 février 2017

LES MOTS


Ce qui me frappe, c’est le recul du concept de phrase dans le Baudelaire par rapport aux Problèmes de linguistique générale, alors qu’elle se place au fondement de la théorie du discours et de l’anthropologie qui lui est corrélée chez Benveniste. En fait : elle y est bien. Sous l’appellation au pluriel des « mots ». Plus fréquent qu’en sa forme au singulier (statistique à vérifier, mais cela ressort nettement à la lecture). On comprend l’obsession autour des mots pour la « langue poétique » que l’auteur recherche. Le Baudelaire est bien un laboratoire de sémiologie, celui de « Sémiologie de la langue » en particulier, objets quasi-synchrones (1967-1968, la belle époque). Le geste est de soustraire les mots et partant le mot au signe – non comme unité empirique ou catégorie de pensée de la langue mais en tant que nom d’une épistémologie résolument discontinuiste. C’est vrai que ça se débloque quand l’auteur parle « discours » voire « énonciation ». Mais : il y a deux pluriels. L’un est un pluriel discret – il désigne un enchaînement d’entités autonomes et discontinues, c’est la valeur traditionnelle ; l’autre est un pluriel compact, insécable, c’est la valeur à promouvoir. Les mots ainsi envisagés aident à redéfinir le singulier « mot » non seulement comme mot lexical (déjà maintenu à titre terminologique dans les Problèmes en vis-à-vis de « signe » pour des raisons liées à sa théorie sémantique) mais comme mot poétique. Qu’est-ce à dire ? Là où ça bouge conceptuellement : l’idée récurrente de « jonction », glosée en « rapports associatifs » ou « associations » (terminologie saussurienne), ou encore « assemblage » (au demeurant, caractérisant habituel de la phrase et de la syntaxe). La jonction glosée aussi en « syntagmatique », qui est plus que le syntaxique et l’inclut. La jonction commence à regarder vers une analytique du continu.