Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

vendredi 9 novembre 2018

LE SENS DE LA RELATIVITÉ

Le regard d’objectivation et de mise à distance dans le temps se conjugue à la déclinaison des altérités – nationales, culturelles, institutionnelles : « from antiquity to the present and from all regions and cultures »(p. 6). L’historiographie se veut résolument comparatiste, loin en particulier de « the Eurocentric worldview », bien que l’argument postcolonial, Edward Saïd à l’appui, cette vision ayant été informée par « the study of languages and civilizations » (p. 6), exigerait d’être détaillé : si l’enjeu n’est autre que la valeur des humanities, l’étude des langues et des « civilisations » est aussi ce qui a libéré le comparatisme et plus largement les relativismes culturels des savoirs dans les épistémologies occidentales. Ainsi posé, l’argument est trop massif pour ne pas être réversible. L’un des exemples les plus marquants en est probablement au XIXesiècle les linguistiques indo-européanistes, dont par ailleurs les conditions d’émergence et surtout de développement sont inséparables et favorisées par le modèle universitaire moderne dans sa version germanique entre autres. Il reste que « the value of the humanities » qui est postulée au long de l’éditorial est posée comme solidaire d’une « cultural consciousness » (id.). Une telle historiographie ne peut donc s’envisager elle-même qu’à travers le multiple des différences, en plaçant comme défi premier le problème de la définition même de son objet dès qu’on mesure la tradition euro-occidentale, sa double racine grecque et chrétienne, à l’« Islamic scholarship » – studia adabiya– (p. 3) ou aux six arts de Confucius pour l’aire chinoise. L’argument le plus incisif à ce sujet est encore le conditionnement empirique, réciproque entre culture – langue – savoir, notamment les limites spontanément imparties par une revue qui use de l’anglais comme lingua franca (et cette dénomination symptôme demanderait en soi clarification – elle est aussi une mythologie de la science, et des sciences) s’il est vrai par exemple que « the division between the humanities and the sciences is emphasized by the terminology itself » ou, par extension, à un autre niveau encore, que dans l’univers du « English-spoken scholarship » la dominante est d’associer « the humanities with historical approaches » (p. 4) plutôt qu’à des méthodes analytiques illustrées à l’inverse par l’école de Vienne, le formalisme russe ou le structuralisme français.