Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

mercredi 9 novembre 2016

UN ÉLÉPHANT, ÇA TROMPE ÉNORMÉMENT


On en reste soi-même tout ébouriffé : la version la plus socialement obscène des éléphants, la plus satyrique et la plus clownesque aussi, la plus spectaculairement pulsionnelle, haineuse et grossière de l’homme de pouvoir.
Et c’est malgré tout une très belle leçon de démocratie.
D’une part, le rappel de qui détient, et exerce véritablement la souveraineté dans un pays libre, à revers des spéculations et des pronostics de la logosphère, du modèle télévisuel des projections, des gloses, des statistiques, des polls achetés et vendus par les instances médiatico-politiques : l’un des signes de basse intensité du forum moderne. En terre américaine, l’intérêt du 8 novembre se situe d’abord dans cet événement, les erreurs cumulées de perception et d’appréciation d’acteurs proposant et imposant une vision sociale du monde au lieu d’en comprendre le fonctionnement réel.
Du moins convient-il de remonter, deux mois plus tôt, au portrait que Salena Zito par exemple dresse du candidat pour The Atlantic (23.09.16), et l’intuition assez justement formulée qui le traverse : « “Fifty-eight percent of black youth cannot get a job, cannot work,” he says. […] It’s a claim that drives fact-checkers to distraction. The Bureau of Labor Statistics puts the unemployment rate for blacks between the ages of 16 and 24 at 20.6 percent. Trump prefers to use its employment-population ratio, a figure that shows only 41.5 percent of blacks in that age bracket are working. But that means he includes full time high-school and college students among the jobless.” » Et l’auteure du papier d’ajouter : « It’s a familiar split. When he makes claims like this, the press takes him literally, but not seriously; his supporters take him seriously, but not literally.* » Entre les deux adverbes, se glissent l’intelligence, la ruse de l'animal politique, aussi démagogue soit-il.
D’autre part, les orientations inquiétantes de cette même souveraineté, cherchant à surmonter les divisions et les inégalités (économiques, sociales, ethniques, etc.) sur le mode du populisme, sont très loin d’être isolées. Elles participent sans nul doute d’une logique large de la mondialisation (voir « Trump – de la mondialisation », http://journaldetravail2008.blospot.ca) dont l’effet se ressentira, en retour, au plan géopolitique. Mais elles confirment sur les deux dernières décennies la tentation récurrente des démocraties d’Amérique et d’Europe, parmi les plus anciennes et solidement ancrées, à emprunter cette voie, eu égard chaque fois aux spécificités nationales : Sarkozy-France, Berlusconi-Italie, Aznard-Espagne, Canada-Harper, sans parler des mouvances ou composantes idéologiques présentes en Hongrie, en Pologne, en Autriche. La signature de notre temps.
God bless America.