Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

dimanche 27 octobre 2019

L'OPPOSITION DISCIPLINÉE

Il me semble que cette injonction éthique du créateur – écrivain, dramaturge, metteur en scène, acteur dans le cas de Lagarce – sorte d’artiste complet et variable en quelque sorte – déplace les termes mêmes de la conclusion du parcours par ailleurs intéressant de Théâtre et pouvoir en Occident (Les Solitaires intempestifs, 2000). Lagarce perçoit bien sur la période immédiatement contemporaine la « mise en institution de la subversion », le travail post-68 de « récupération » (p. 157). Il pointe déjà le phénomène avec lequel il sera aux prises dans les années 80, l’élan de « la décentralisation française » et ses effets d’« opposition disciplinée » (p. 158). Il s’y énonce au moins cette lucidité, que les formes du pouvoir qui s’exercent sur le théâtre et de l’intérieur du théâtre, à commencer par la figure du metteur en scène, créateur mais aussi administrateur (en dépendance de la logique économiste des subventions), est loin d’avoir disparu. Lagarce parle de conscience de cet effet d’institution et de peser sur le « maximum de possibilités de décalage existant entre le discours institutionnalisé et un discours de subversion, pris dans ces mêmes structures » (id.) C’est à cette idéologie – circulaire et datée– de la subversion, ou du rapport subversion-institution, que se soustrait l’injonction éthique et critique de l’incertitude et de l’inconnaissance : aller son chemin.