Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

vendredi 15 juin 2018

RUMINATIO

Exactitude du jugement pour qualifier dans leur ensemble ces notes, listes, morceaux plus ou moins développés, des concepts à l’essai qu’il faut soi-même assembler. La déception qui entoure la découverte, dès lors que le travail descriptif et analytique ne tend guère à l’état formalisé de propositions ; l’intérêt intellectuel que ces manuscrits suscitent malgré tout, par les errements, les obstacles, les angles morts : la rumination ou « écriture ruminée » selon Irène Fenoglio (« Les notes de travail d’Émile Benveniste : où la pensée théorique naît via son énonciation », Langage et société. Écritures scientifiques, carnets, notes, ébauches, n°127, Paris, Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, 2009, p. 33.) Dans cette rumination, il y a de l’obsession – et celle-ci se laisse lire à travers la scansion perpétuée de l’adjectif et du substantif « poétique » - centre nerveux de la pensée.