Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

samedi 30 avril 2022

DIVERSION

  L’étrange danse du ventre de certains recteurs d’universités, qui visent sans convaincre à faire diversion auprès du grand public. Ceux-là ne cessent de répéter leur opposition au principe même d’une loi statuant sur la liberté académique, sans vraiment se donner la peine de commenter ou de contester techniquement dans sa lettre le projet de loi 32. Exemplairement : Daniel Jutras, À quoi servent les universités ? (Le Devoir30.04.2022). Au reste, la position énoncée a été sensiblement la même. Le 10 février 2021, alors que les administrateurs, jusque-là silencieux, sont sommés de prendre position en faveur de la liberté académique dans l’espace médiatique : « On n’est pas au milieu d’une crise existentielle ». Et cette prophétie, l’auteur la répétera en août 2021 devant la commission Cloutier et quelques jours après que cette commission aura livré son rapport en décembre de la même année, sur la base de sondages. À n’en pas douter, il s’agit là d’une contribution majeure au débat national. Dans cette énième version, la stratégie d’opposition à la loi est cette fois plus contournée, moins frontale. On s’étonne juste de cette singulière vertu dont sont tout à coup dotées les universités, celle de « l’autocorrection ». Par quel miracle institutionnel quand on songe que les incidents ne cessent de se multiplier depuis 2011 au Canada, sans parler, plus nombreux encore, des États-Unis ? Désormais, il n'y a plus de crise ; on parle plutôt de « menaces passagères ». Et Jutras semble habité de cet extraordinaire potentiel divinatoire qu’il peut prévoir à l’avance que ces menaces ne dureront pas. Évidemment, celles-ci ne sont ni nommées ni décrites. On se demande bien par exemple si les pressions qu’exercent le monde de l’entreprise et les diktats de l’économisme sont bien des menaces passagères. Quant à l’imaginaire de l’arbre, il dissimule le présentisme du propos. Voilà un recteur qui semble oublier que la question de la loi, précisant les rapports des universités et de l’État, est sur la table depuis la Révolution tranquille et le rapport Parent de 1964, qu’elle est inséparable en conséquence de l’émergence du Québec moderne. Amnésie ?